Ce petit garçon, il s’est endormi dans son lit en tenant si fort contre lui son doudou qu’il l’a emmené avec lui. Cette petite fille là-bas, elle a juste battu des cils, elle jouait à la princesse. Et l’autre, juste derrière, presque un adulte, il faisait les yeux doux à une fille juste avant de retourner se coucher, le cœur plein d’espoir. Ils sont tous venu, les uns après les autres, garçons et filles, jeune enfant et adolescent. Ils ont ouverts les yeux sur un monde étrange, les pieds dans le sable, seuls. Ils se sont réveillés sans comprendre, sans savoir, perdus devant l’immensité d’une ile sauvage.  Et même les plus vieux, les plus courageux, se sont mis à douter. Ils ont cru rêver un instant, ils se sont pincés si forts que les larmes ont menacé leurs yeux. Mais rien n’y a fait, ils ne se sont pas réveillés. Alors, courageux et fiers, ou peut-être un peu effrayés, ils ont entrepris d’explorer l’ile a la recherche d’un signe de vie.

Les plus chanceux ont vite rejoint un des nombreux camps d’enfants de l’ile. Protégés derrière les barrières, les barricades, ils ont pu se reposer un court instant sans craindre l’arrivée de la nuit. Les autres, les malchanceux, ceux qui souffrent d’un mal étrange, qui ont toujours la guigne, ou qu’ils aillent et quoi qu’ils fassent. Ceux-là, ils n’ont pas trouvé tout de suite les refuges. Entre les griffes des sirènes ou des créatures maléfiques de l’ile, ils ont eu un avant-goût de l’enfer. Fuyant les malices des créatures magiques, ils se sont perdus dans la jungle si dense, si profonde, qu’ils n’ont jamais réussi à retrouver leurs chemins. Et quand bien même ils ont échappé aux griffes des créatures malfaisantes, ils ont ressenti une menace à nulle autre pareille. Car avec l’arrivée de la nuit, un nouveau danger s’éveille. La nuit, il ne faut pas rester en dehors des camps. Jamais. Car nul sait entre les griffes de quelle créature, quel monstre, quel danger, il est possible d’être pris au piège.

A l’aube pourtant, l’ile est si belle. Les fleurs s’ouvrent, les feuilles reflètent les lueurs dorées du soleil. Ses rives sont de sables blancs, les eaux sont turquoises. L’ile brille d’une magie ancestrale, profonde, d’un calme reposant. Mille créatures fantastiques peuplent ses bois. Les fées malicieuses et joueuses qui murmurent tantôt des bêtises, tantôt des promesses, les elfes et les faunes qui protègent et habitent cette nature florissante, et même les sirènes semblent plus douces quand vient le jour. L’ile toute entière exalte une fraicheur de vivre, tout semble possible, tout semble magique. Les enfants n’ont qu’à tendre les doigts pour avoir ce qu’ils désirent. L’ile leur offre tous ses bienfaits. Ils ne vieillissent pas, ni ne grandissent et même certains, les plus chanceux reçoivent des dons magiques. Sans que nul sache pourquoi.

Le jour, ils ne craignent rien, ou presque car une nouvelle menace couve. Quelques éclaireurs ont aperçu dans l’ile, à l’opposé de leurs camps, un camp d’adultes. A la recherche de quelque chose, du trésor des sirènes, ou peut-être de celui, plus précieux, de cette magie étrange qui permet aux enfants de ne plus grandir, les adultes errent sans prendre garde aux créatures qu’ils bousculent et à cette nature qu’ils pourfendent. Et, si ce n’était pas assez, une ombre rode autour de leurs camps, arrachant leurs ombres sitôt qu’ils ont le dos tourné. Alors les enfants les évitent, ils restent cachés dans les ombres de la jungle. Ils ne veulent pas se montrer, pas les croiser,  sans savoir ce que les adultes veulent vraiment et pourquoi ils sont là.




texte par Mirahil.